Vous êtes copropriétaire d’un bien immobilier avec vos enfants, vos frères et sœurs, ou d’autres membres de votre famille, et vous vous demandez s’il est possible de vendre ce bien en viager ? C’est une question légitime. La réponse dépend du cadre juridique de l’indivision et des modalités choisies de la vente viagère. C’est ce que nous allons détailler dans cet article. Vous découvrirez également les conséquences patrimoniales et fiscales de cette opération, ainsi que les bonnes pratiques à adopter pour éviter les conflits entre indivisaires.
L’indivision désigne la situation dans laquelle plusieurs personnes possèdent ensemble un bien immobilier, sans division matérielle de leurs parts. Chacun détient une quote-part abstraite (par exemple, 50 %, 25 %, etc.), mais aucun des co-indivisaires ne peut revendiquer une partie spécifique du bien, sans que ce dernier n'ait été vendu. Cette configuration apparaît souvent à la suite d’une succession, d’un divorce ou d’un investissement commun.
Or, la vente en viager suppose le transfert de la propriété du bien à un acquéreur en échange d’un bouquet et d’une rente viagère. Cette vente modifie donc profondément la structure patrimoniale du bien. Contrairement à une vente classique, elle s’accompagne également d’un engagement de long terme entre le vendeur (ou les vendeurs) et l’acheteur. Ces éléments font du viager une opération particulière qui ne peut pas être décidée unilatéralement.
La règle est sans équivoque : la vente en viager d’un bien en indivision ne peut se faire qu’avec l’accord de tous les co-indivisaires du fait que chaque décision affectant la propriété, et donc la structure du bien, doit être prise à l’unanimité. Cela vaut pour une vente à titre définitif, mais aussi pour un démembrement ou une constitution d’usufruit. Le Code civil, dans son article 815, encadre strictement les droits et obligations des indivisaires : aucun ne peut contraindre les autres à vendre, ni vendre seul le bien indivis.
Concrètement, cela signifie que si vous êtes copropriétaire d’un bien avec vos enfants, vos frères ou d’autres membres de votre famille, vous ne pouvez pas vendre ce bien en viager sans leur consentement explicite. Cette obligation concerne l’acte de vente en lui-même ainsi que les conditions de l’opération : montant du bouquet, montant de la rente, répartition entre les parties, éventuelle clause de réversibilité, etc.
Contrairement à une mise en location ou à certains actes d’administration courante, la vente en viager est juridiquement considérée comme un acte de disposition. Cet acte est matérialisé par l'acte de vente notarié qui officialise la transaction, et engage irréversiblement le bien et les acheteurs, et ce, pour une durée incertaine, liée à la vie du ou des crédirentiers. Cet engagement a des conséquences directes pour chaque indivisaire. Par exemple, si l’un d’eux décède, sa quote-part passe à ses héritiers, qui deviennent à leur tour parties prenantes du contrat. De plus, la vente en viager modifie l’équilibre patrimonial : le bien n’est plus transmissible, la rente peut être réversible ou non, et les flux financiers peuvent devenir source de conflits.
C’est précisément parce qu’une vente en viager engage l’ensemble du bien, modifie la répartition patrimoniale, et crée des obligations durables, que la loi exige l’accord unanime de tous les indivisaires. Cette exigence garantit la légitimité de la transaction et protège les deux parties contre tout risque de contestation future.
La situation se complique lorsque l’un des indivisaires s’oppose à la vente. Dans ce cas, plusieurs options sont envisageables, mais toutes impliquent une procédure judiciaire plus ou moins lourde.
La première est la sortie de l’indivision. L’article 815 du Code civil prévoit que « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision ». Si aucun accord n’est trouvé, un indivisaire peut saisir le tribunal judiciaire pour demander le partage. Le juge peut alors ordonner la vente du bien, à l’amiable ou aux enchères. Attention toutefois : dans ce cadre, la vente en viager n’est pas automatique. Il s’agit le plus souvent d’une cession classique, sans rente viagère.
La seconde option consiste à racheter les parts des autres indivisaires. Si vous souhaitez vendre seul le bien en viager, vous pouvez proposer de racheter les quotes-parts des autres. Une fois devenu plein propriétaire, vous serez libre de procéder à la vente. Cette solution suppose néanmoins d’avoir les moyens financiers nécessaires et d’obtenir l’accord de cession.
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Ce cas est fréquent : après le décès d’un époux, le conjoint survivant se retrouve en indivision avec ses enfants. En effet, lorsqu’il n’y a pas de règle particulière de prévue, par exemple une donation entre époux ou un testament, la part de l'époux décédé revient aux enfants. Si le logement familial est le bien en indivision, la situation peut devenir sensible du fait que la loi réserve des droits d’habitation au conjoint survivant (un an, ou un droit d’usage viager si celui-ci a été prévu), mais qu’elle ne lui confère pas la pleine propriété. Il est donc impossible au conjoint survivant de vendre le bien en viager sans l’accord des enfants, devenus eux aussi propriétaires indivis.
Pour avancer sur un tel projet, une discussion familiale ouverte est fortement recommandée. Il est parfois possible de trouver un terrain d’entente en prévoyant une répartition équitable des rentes entre les héritiers ou en structurant la vente sur deux têtes (avec le conjoint et un enfant crédirentier).
Une autre question se pose parfois : est-il possible de vendre uniquement sa part en viager, sans l’accord des autres indivisaires ? En théorie, cela n’est pas interdit. Vous pouvez céder votre quote-part à un tiers ou à un autre indivisaire. Cependant, une vente en viager portant uniquement sur une quote-part est extrêmement complexe, tant juridiquement qu’économiquement.
L’acquéreur de cette part devient co-indivisaire, sans pour autant avoir la jouissance effective du bien. Il devra composer avec les autres propriétaires, sans garantie de pouvoir utiliser le bien ni le revendre facilement. De ce fait, les viagers sur quote-part sont rares et généralement déconseillés. Ils sont également difficilement finançables et très peu attractifs pour les investisseurs.
Si vous obtenez l’accord de tous les indivisaires, il est essentiel de formaliser précisément les modalités de la vente. Cela passe par un acte notarié qui détaille les montants, les parts de chacun, les éventuelles clauses de réversibilité, et les garanties prévues en cas de non-paiement de la rente.
La rédaction de l’acte doit également anticiper les cas de décès, de sortie d’un indivisaire ou de transmission de part. Il est vivement recommandé de faire appel à un notaire expérimenté en viager ou à un professionnel comme Justager pour accompagner la structuration du projet.
Une fois la vente actée, les rentes viagères sont réparties entre les anciens indivisaires selon la quote-part de chacun. Cette répartition peut être simplifiée grâce à la mise en place d’un compte commun de réception ou d’un mandat entre les anciens copropriétaires.
Chez Justager, nous accompagnons les particuliers et les professionnels sur ces opérations sensibles, en veillant à la sécurité juridique de chaque étape. Notre rôle : clarifier le cadre, prévenir les litiges et vous aider à structurer un projet conforme aux règles de l’indivision comme à celles du viager. Vous souhaitez mieux vous informer sur les enjeux de l’indivision et du viager ? Contactez-nous.
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